Épiceries dans nos villages :
 
  pourquoi c'est important.
 
   
  A l'heure où il y aurait comme qui dirait un soupçon ténu de morosité dans le monde, il est toujours apaisant de s'intéresser à des sujets qui ne parlent pas de Trump le Vicieux ou de bombes nucléaires censés nous raser la casquette.
Donc, aujourd'hui, causons de l'utilité fabuleuse des épiceries dans nos villages face aux hypermarchés ou supermarchés. Le sujet est plus léger, ça ne mange pas de pain et ça permet de causer sans se sauter à la face pour essayer de convaincre autrui qu'il a forcément tort, question politique.
D'ailleurs, autrui a toujours tort.
 
 

Comment ?
Mais non, ne soyez pas taquins, nous n'avons pas été payés pour faire de la publicité à nos épiceries et supérettes locales face aux supermarchés et hypermarchés.
Vous ne le croyez pas ? Nous en sommes réellement désolés et du coup, on ne vous aime pas.

 
     
  Cet article a été écrit par l'un des participants à ce site. Si vous n'êtes pas en accord avec ce texte, alors n'hésitez pas à donner votre point de vue par mail.  
     
 

• L'épicerie à Papa.

Les épiceries ont longtemps eu une image vieillotte, l'épicerie à Papa, quoi.
Présentes depuis la nuit des temps, elles faisaient crédit jusqu'à une échéance sacrée, celle de la paie, en espèces sonnantes et trébuchantes.
Pour l'anecdote, les femmes se postaient d'ailleurs fermement ce jour-là à la sortie de la scierie ou de l'usine de gemmage pour récupérer l'argent durement gagné par son homme, argent qui risquait sinon de disparaître à la vitesse de l'éclair dans l'estaminet du coin.
Aussitôt, les mères de famille se précipitaient à l'épicerie régler leur ardoise, sachant qu'elles ne faisaient pas de folies et que l'essentiel de leur dette se composait de ce qu'il faut pour survivre, tant bien que mal.
Plutôt mal que bien, en fait. La nichée avait faim et les temps étaient durs.

- Il y a déjà un petit bout de temps, les épiceries vendaient surtout
des produits essentiels pour l'époque : grains, charbon, etc. -

Au fil des décennies, ces petits commerces (parfois en situation de monopoles avec quelques abus à la clé, question prix), ont peu à peu disparu de nos villages, face à des supérettes ou supermarchés plus abordables, qui eux-mêmes se sont pris de sévères gifles pour cause d'hyper-marchés agressifs. Qui eux-mêmes rencontrent quelques difficultés ces derniers temps.

 
"La fin des quincailleries, épiceries, magasins de chaussures, merceries, crèmeries et autres boutiques dans les campagnes a été inéluctable".

• Un hypermarché dispose d'une surface supérieure à 2 500 m². Il vend de tout et on se demande si certains managers ne vendraient pas leur propre mère, à condition que la marge leur paraisse intéressante. Leurs prix sont souvent attractifs, mais les pièges nombreux.

• Le supermarché, lui, couvre une surface de vente comprise entre 400 m² et 2 500 m². Du coup, ils vendent forcément moins de produits que les hypers.

• La supérette couvre entre 120 et 400 m2.

L'épicerie, enfin, propose une surface inférieure à 120 m2.

Voilà, ça c'est de l'info.

 
     
 

• Avant et après.

Les années 1990 et 2000 furent particulièrement violentes pour les boucheries, quincailleries, épiceries, magasins de chaussures, merceries, crèmeries et autres boutiques dans les campagnes et ils furent caterpillarisés sans pitié.
Entre 1996 et 2006, la France a perdu 28% de ses épiceries. Excusez du peu...

Bien sûr, des petits commerces continuèrent à s'ouvrir, mais beaucoup baissaient bien vite le rideau. Il s'agissait de longévités aléatoires, souvent très éphémères.



- Photo montrant un homme trop content d'avoir enfin fini de faire ses courses dans un supermarché. Dans une épicerie, il serait content aussi AVANT de faire son marché. Oui, d'accord, c'est injuste ! :) -

Et aujourd'hui ? Etonnamment, peu à peu, surtout dans les villes, les épiceries sont redevenues à la mode, en faisant souvent référence au passé dans leur présentation et leur décoration, en diversifiant aussi leurs étals.
Donc, elles proposent aussi un petit coin thé-café, sont souvent à thèmes et essayent des tas de pistes pour attirer le chaland. Mais si le marché existe, il vise tout de même celui des citadins très aisés, ce qui n'est pas le but recherché dans nos campagnes.

 
  "Entre 1996 et 2006, la France a perdu 28% de ses épiceries".  
 

• Un renouveau ?

On ne va pas parler du tout ici de Langon ou Bazas. Les problèmes des petites communes ne sont pas les leurs.
Causons plutôt de nos villages qui disposent encore actuellement d'une épicerie ou d'une supérette, et de ceux qui en voudraient bien une.
Ce sont par définition des structures fragiles et il est toujours plus facile pour ces petits commerces de disparaître que de naître.
On peut dire ce que l'on veut, une épicerie dans une petite commune, ce n'est que du positif.
Bien sûr, oui, on sait, les prix ne sont pas forcément les mêmes, mais s'y rendre, même pour des achats occasionnels, permet de maintenir une lueur rassurante dans la nuit sombre du temps qui avance, projetant les campagnes dans un vide social chaque jour plus accentué (en voilà une phrase bien tournée et... boursouflée ! ).
Disparition des services publics, communautés de communes diverses qui sentent parfois le pâté faisandé tellement l'idée de mutualisation semble signifier gestion à la baisse, en sont par exemple les causes et les conséquences évidentes, le serpent se mordant la queue.

On résume : plus y a de petits commerces dans un village, plus le village il vit. Et plus le citoyen, il est content.

 
"Les supers et hypers marchés sont souvent moches et froids".

- Les épiceries sont toujours dans le village, pas à l'extérieur.
Argument positif d'une logique imparable ! -

 
 

• De Moustey à Budos.

Sore, Luxey, Moustey, Saint-Symphorien, Préchac, Louchats, Uzeste, Hostens, Villandraut, Léogeats, Guillos, Budos et plein d'autres ont la chance de pouvoir disposer d'une épicerie ou d'une supérette dans la commune. D'autres n'ont pas ou n'ont plus cette opportunité.

Chance ? Pourquoi "Chance" ?
Parce que.

Parce que les supermarchés et hypermarchés sont souvent moches et froids. Longs alignements de produits sinistres, passages à la caisse souvent peu conviviaux, prix pas systématiquement si attractifs que ça, malgré la réputation de plus c'est grand, moins c'est cher.

Serions-nous de parti-pris ? Sans doute. Mais nous avons trouvé les légumes plus agréables au goût dans certaines épiceries que dans des supermarchés où certaines fraises, par exemple, ont le goût de... ben, de rien. Et si l'on sort du cadre strict des épiceries, pour les quelques grandes surfaces qui vendent de la viande, restons lucide, la comparaison n'est pas possible, car le boucher local l'emporte haut la main.

 
 

Concernant les grandes surfaces et les épiceries, certaines idées sont à réviser.

Les heures d'ouvertures (amplitudes horaires), par exemple.
Si elles sont conséquentes dans les hypermarchés, elles sont devenues relativement importantes aussi dans les petits magasins. Certains ouvrent même le dimanche toute la journée. Si elles ne sont pas complètement comparables, il ne faut pas oublier que la petite épicerie n'a souvent qu'un(e) employé(e), le ou la gérant(e) du magasin. A charge à cette personne de se taper tout le boulot dès très tôt le matin, avec les soucis de comptabilité, les efforts physiques importants (port de charges lourdes), des tensions en approvisionnement, etc. Tout ça se passe en dehors des horaires d'ouvertures de la boutique et c'est du gros travail dont personne ne se rend vraiment compte.
Ajoutons à cela que beaucoup de ces commerces sont aussi des points-relais de colis afin d'assurer un surplus de trésorerie et le tableau sera complet.

On pourrait parler aussi des dates de péremption de produits qui seraient beaucoup plus limites en épicerie qu'en grande surface, à cause d'un volume de ventes moins important. Pas vrai ou plus vrai, nous l'avons vérifié sur 8 épiceries et supérettes. Un seul de ces petites surfaces vendait des yaourts dont la date limite était out. Par contre, dans un hyper, nous avons constaté dans un rayon que deux steaks sous blister, bien que dans le bon créneau de dates, étaient carrément verdâtres et peu appétissants, odeur à l'appui. Nous avons évité de les acheter, on ne sait jamais. Donc on peut trouver des "égarements" partout.

Il existe enfin l'affirmation selon laquelle une épicerie ne peut pas survivre s'il y a une grande surface proche, du genre entre 5 et 10 kms plus loin. Pas vrai. Certains villages ont démontré le contraire, alors que le supermarché était installé dans la même commune.
Leur rôle est juste complémentaire. Par contre quand, il existe deux grandes surfaces dans une même commune, comme à Belin-Béliet, ça peut devenir compliqué.

 
     
 

• On se fait des ch'tites comparaisons ?

Pas question ici de cracher sur les grandes surfaces car, de façon générale, elles sont un gros, gros + pour les communes environnantes. Elles proposent un éventail plus large de produits (du carburant, par exemple), MAIS le but de cet article est de nous faire sortir des idées reçues et trop bien ancrées. Parler petits commerces face aux mastodontes, c'est penser complémentarité.

Car les épiceries et supérettes peuvent offrir des prestations que ne peuvent vraiment proposer certaines grandes surfaces du coin (telles que Noaillan, Saint-Symphorien, etc.), malgré des prix différents.

Déjà, elles offrent plus facilement la convivialité, la plupart du temps. On peut causer un instant, prendre un peu plus de temps. Rencontrer des gens que l'on connaît ou pas. Si, si, c'est du vécu.
Autre avantage, l'épicerie se trouvant la plupart du temps dans le centre du village, on peut y passer vite fait acheter l'article qui nous manque ou plus, si affinités.

 
 

Mairies, épiceries
et citoyens

 
 

Les Mairies ont-elles un rôle à jouer dans l'accueil de nouveaux magasins d'alimentation ? Bien sûr.
Cela peut passer par de nombreuses aides concrètes (prêt d'un local, etc.).
Même si la Mairie de Villandraut manque un peu de modestie en écrivant qu'elle est "la seule du Sud-Gironde à avoir préservé intact son tissu d'artisans et commerces de proximité", on ne peut nier que dans ce domaine l'énergie d'une équipe municipale compte beaucoup.
Boucheries, épiceries, boulangeries, de nombreux commerces peuvent être concernés et c'est déjà le cas dans certains villages du Sud-Gironde
.

Quoi qu'il en soit, ouvrir une épicerie pour un particulier, c'est déjà prévoir un budget initial de 60.000 € minimum. Ça calme. Donc, toute aide proposée par une municipalité, quelle qu'elle soit, est la bienvenue. Elle y trouvera d'ailleurs souvent son compte.

Bien sûr, il existe aussi la possibilité de créations "d'épiceries participatives" dans lesquelles les habitants d'un village deviennent les acteurs bénévoles efficaces d'un commerce (comme la boulangerie coopérative d'Uzeste). Ce n'est pas le Pérou pour les aides, et la pérennité peut sembler incertaine, mais 150 villages en France ont déjà franchi le pas et ça marche.

Tout faire pour que les villages vivent, en somme, c'est le but.

 
 
 
 

Dans un petit commerce, le vendeur va souvent prendre le temps de vous renseigner et de vous aider, ce qui est rarement le cas dans les hypermarchés, où celui que l'on interroge semble toujours très pressé (d'ailleurs, il l'est, c'est souvent un boulot de fou, entre la multiplicité des tâches et les horaires déstructurés).

L'épicier va aussi adapter son offre à sa clientèle locale, et il fera travailler un peu plus les producteurs locaux en circuits courts. C'est d'ailleurs son intérêt.
Cela devient le vôtre, du coup.

Prenons aussi en compte le fait que les négociations des épiciers avec les producteurs locaux sont nettement moins sauvages que dans le cas des hypermarchés qui ont tendance à se la jouer parfois Far-West et à bien mettre la pression sur les agriculteurs et les éleveurs, on peut donc trouver que moralement les petits commerces ont du bon.

 

- D'un monde à l'autre -

 

• Conclusion.

Se rendre de temps en temps dans une épicerie est LE moyen de maintenir un village en vie.
Faut pas rêver. Les choses ont un coût.
Un commerce dans un village, ça se paye, vu le service rendu. C'est sûr que quand il n'existe plus aucun commerce dans la commune, on fait pas mal d'économies, et c'est bien, on est carrément avancés.

On conclut ?
Nous avons pu souvent rencontrer dans des épiceries locales des gens charmants et efficaces, réellement. Face au monopole souvent réel des grandes surfaces, ils ont du courage, c'est le moins que l'on puisse dire. Pour certains, le mot "passion" a même été prononcé...

 
 
   
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